Avec Clockers, Richard Price nous entraîne dans le monde des dealers et des policiers chargés de les arrêter. Le roman, publié en 1992, vient d’être réédité par les Éditions 10/18. Une véritable plongée dans cet univers grâce au réalisme saisissant de l’écriture de Richard Price.
Résumé
L’action se déroule près de New-York, dans une petite ville de banlieue, côté New Jersey. L’inspecteur Rocco Klein est chargé de l’enquête sur le meurtre d’un dealer. C’est alors qu’il va croiser le chemin de Strike, chef d’une équipe de clockers.
Véritable plongée dans l’univers des clockers
Clockers est une véritable immersion dans le monde de la drogue et des petits dealers. L’intrigue se situe dans la ville fictive de Dempsy dans le New Jersey, entre Jersey City et Bayonne. La ville est proche de New York et l’action semble se dérouler à la fin des années 1980 ou au tout début des années 1990.
Les clockers sont des petits dealers que on trouve aux coins des rues, ils sont au bas de l’échelle et vendent pour la plupart des doses de crack. Au quotidien, ils doivent jongler entre les doses à écouler pour leurs supérieurs et les policiers qui les traquent.
On note dans ce roman une dose d’espoir avec certains dealers qui semblent avoir la volonté de se sortir de là, c’est d’ailleurs le cas de Strike, le personnage principal.
Mais l’intrigue se corse avec le meurtre d’un gérant de restaurant gênant que Strike est chargé d’abattre. Or, Victor, le frère de Strike s’accuse d’être l’auteur du meurtre, alors qu’il en semble incapable.
Par ailleurs, le danger, la peur et l’angoisse sont très présents, tout au long du roman. Cela se manifeste chez Strike par des bégaiements et un ulcère. Son but est d’accumuler encore un peu d’argent, fuir cette ville, ce monde dangereux et pourri, et tenter une nouvelle vie ailleurs.
Aussi, avec les policiers Rocco Klein et Larry Mazilli, ainsi que d’autres policiers dont certains véreux, on suit leur travail au quotidien pour contrôler ces trafics.
Réalisme dans l’écriture de Richard Price
Dans Clockers, le réalisme est frappant. On a réellement l’impression d’être sur le terrain. Les chapitres alternent entre l’univers des dealers, en suivant pas à pas Strike, 19 ans, qui gère une petite équipe de jeunes clockers et les policiers qui cherchent à les coincer.
Clockers est une sorte de chronique sociale quotidienne dans une petite ville de banlieue. C’est aussi un polar bien ficelé dans le monde des dealers et des policiers.
Le réalisme et la précision sont saisissants, allant dans les moindres détails, organisation du réseau, coupage de la drogue, planques chez des retraités pauvres en échange d’une aide au loyer…
Concernant les clockers, on a une analyse de la hiérarchie, des motivations, de l’enrôlement, de la peur de certains et pour d’autres la volonté de s’en sortir.
Les personnages sont bien dépeints. Certains sont attachants. L’atmosphère est bien décrite et la psychologie de certains personnages intéressante. De plus, l’intrigue est pimentée par quelques meurtres et le suspens est croissant.
Par ailleurs, le titre paraît en 1992 et on voit donc apparaître dans le roman des véhicules vintages tels que Plymouth Fury, Chevrolet Nova, Plymouth Reliant, Oldsmobile Delta 88 ou Honda Accord.
Ce roman a inspiré la série “The Wire/Sur écoute” et a été adapté en 1995 par Spike Lee dans le film “Clockers”.
Extraits de Clockers
En fin de compte Strike préférait les ennemis aux amis. Avec les ennemis, au moins, on sait où on en est. (p.20)
Faire le dealer, c’était comme traverser un champ de mines avec un bandeau sur les yeux. C’était dur de savoir ce qu’il fallait faire et ne pas faire, mais pour survivre Strike observait trois règles inviolables : ne se fier à personne, ne pas être trop gourmand, ne jamais trafiquer la marchandise. La plupart de ceux qui duraient dans le secteur appliquaient les mêmes règles, plus la règle numéro quatre, sorte de correctif à la première : avoir quelqu’un qui surveille vos arrières. Sans lui faire entièrement confiance. Mais seul, c’est trop dur ; il y a toujours un truc pour lequel on a besoin d’un coup de main. Payer la caution, ramasser le fric, flanquer une rouste – sans compter l’impossibilité d’être à deux endroits en même temps. (p.39)
Rocco, cette nana que t’allais étriper, il y a vingt ans, quand elle était gamine, j’ai arrêté son père parce qu’il avait battu son petit frère à mort. Une vraie ordure, le père. Maintenant qu’elle a grandi, c’est une vraie ordure elle aussi. Ce bébé que t’as sauvé ce soir, s’il grandit, il sera une vraie ordure lui aussi, Rocco. C’est le cycle de la merde, on n’y peut rien. Alors, fais juste ton boulot sans te biller. (p.127)
Il y avait trop de choses dans l’air pour que ça finisse bien, Strike le savait, comme il savait qu’en dépit de tout ce qu’il répétait sur la nécessité de préparer l’avenir il se comportait comme un clocker, comme un débile incapable de voir plus loin que les deux minutes suivantes. (p. 243)
Clockers de Richard Price
Publié par les Éditions 10/18
Voir le livre sur le site de l’éditeur
Traduction de Jacques Martinache
744 pages / 10,20 euros
Publié pour la première fois en 1992
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Je tiens à remercier les Éditions 10/18 pour cette lecture passionnante.